• Qui s'attaquera la loi DADVSI ?

    La loi DADVSI (droit d'auteur et droits voisins dans le société de l'information) = en gros, c'est ce qui réglemente d'un côté les droits de tout créateur (texte, photo, base de donnée, film, musique, etc.) et de l'autre la diffusion des idées et des oeuvres.

     

    Tout commence en 2001 par une directive européenne : l'Union européenne n'ayant alors ni projet politique formalisé, encore moins de projet culturel, l'harmonisation du droit d'auteur est donc faite dans un seul but marchand et économique (marché commun, favoriser les investissements, protége les industries culturelles, etc.). La France, toujours très enthousiaste et courageuse quandil s'agit de construction européenne, attend 2006 pour transposer la directive dans le droit national (5 ans ! alors même que l'Union européenne rouvre le chantier et planche sur une nouvelle directive).

     La commission et le parlement européen avaient toutefois laissé des portes ouvertes aux différents Etats pour qu'ils conservent des spécificités liées à la circulation des idées et des oeuvres, à la liberté de création, etc. Il s'agissait de maintenir un équilibre fragile et sans cesse en péril depuis le XVe siècle (apparition de l'imprimerie et donc des interédiaires industriels et commerçants entre le créateur et son public) entre la juste rémunération des auteurs (mais on le dit moins souvent, la confortable rentabilité des investisseurs et producteurs culturels) et la circulation des biens culturels.

    La directive européenne prévoyait donc des "exceptions" : le nouveau droit interdidait des pratiques, obligeait des accords et des rémunérations systématiques, sauf dans certains cas qui tenaient à la diffusion des idées, la démocratisation du savoir, l'accès de tous aux oeuvres de l'art et de l'esprit, etc.

    C'est-là que ça a bien patiné du côté français : d'un côté des producteurs culturels devenues industries multinationales aux intérêts économiques énormes, de l'autre des idéologues et militants pour une diffusion la plus libre possible des productions culturelles (enseignants, cadres de l'administration culturelle, bibliothécaires, militants de l'informatique libre, etc.). Entre eux, les députés et sénateurs.

    Au coeur de cette bataille historique - et qui, nous l'espérons, n'est pas finie - une représentation des nouvelles technologies (peer-to-peer, internet, etc.) : soit on considère (parfois à juste titre) que c'est un danger pour la production culturelle, soit on considère que c'est une chance inouïe pour l'accomplissement du vieux rêve de démocratisation-démocratie culturelle.

    Il y a eu dans cette bataille un vériotable coup de théâtre : la majorité UMP de l'Assemblée nationale s'est révélée plus libre que prévu par rapport au gouvernement qui imposait une vision du texte centrée sur l'ajout de rémunérations aux intermédiaires et la pénalisation des pratiques libertaire de l'internet. Ayant écouté plus que de coutume les différents acteurs du débat (associations d'internautes, associations de professionnels de la culture, etc.), ils en arrivèrent à voter "l'impensable" : le principe d'une licence globale. Idéologiquement, c'est être du côté des "libertaires", mais pragmatiquement, c'était aller chercher la rémunération des oeuvres là où se trouvait le paiement du ticket d'entrée (les fournisseurs d'accès). 

    En gros, c'était une véritable révolution : aurait été créé un système de diffusion et partage légal des oeuvres (musique, films, textes, etc.) sans nul autre pareil dans l'histoire.

    Un certain ministre de l'Intérieur, proche de grands groupes d'industries culturelles classiques, mit de l'ordre dans tout ça (et surtout de l'ordre parmi ces députés irresponsables) et la loi DADVSI fut adoptée dans une forme qui ne répond pas aux pratiques actuelles (le téléchargement illégal continue de croître sans responsabiliser les usagers ni trouver des sources de rémunération légitime aux créateurs) et déséquilibre un système de droit d'auteur à la française qui était relativement simple, et qui devient une véritable usine à gaz dans laquelle plus personne ne comprend rien.

    Du côté des "exceptions" permises par la "pourtant pas très gauchiste" Union européenne, les députés et sénateurs français es ont réduites à la portion congrue. En gros, pour continuer à diffuser le savoir ou la création, quand on est une bibliothèque, une association, ou un simple particulier, il faut payer plus qu'avant (sans contrepartie).

    On a tout simplement raté une occasion historique de développer la diffusion culturelle, et par là la création, l'innovation. Mais on a surtout raté l'occasion d'établir un système juste et réaliste, de raccrocher le vieil équilibre propriété-diffusion intellectuelle à la situation actuelle boulerversée par les révolutions technologiques.

    La loi crée un nouvel organisme, une Haute autorité de régulation pour les mesures techniques de protection (DRM) au moment où la création d'un grand service public de l'Internet, cette bibliothèque d'un genre entièrement nouveau que Mitterrand appelait de ses voeux en 1988 (et qui donnait la gigantesque bibliothèque d'un genre entièrement traditionnel qui porte son nom), un nouveau souffle pour l'action culturelle, artistique et pédagogique publique, aurait sans doute, toujours selon des mots présidentiels, fait que la France étonnât encore le monde.


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  • Commentaires

    1
    Vendredi 30 Mars 2007 à 13:09
    cela se nomme
    rater le coche et en plus moderne rater le clavier dommage !mais c'est voulu
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