• "Les collectivités locales qui, par leur proximité pratiquent au quotidien l'interaction des politiques publiques locales, sont-elles obligées de laisser vivre leurs bibliothèques selon des valeurs définies par la nomenklatura culturelle ? Est-il notamment bien nécessaire de reproduire localement la division, voire l'opposition, entre culture et éducation, chère aux ministères éponymes ?"

    Et Thierry Giappiconi, conservateur des bibliothèques qui signe cet article dans la Lettre du cadre de février dernier de "rêver" à une politique de coordination régionale des services d'information et de diffusion culturelle, quelle que soit l'administration de tutelle : enfin les BU et les BM d'une même ville, les BM d'une même région, les centres de documentation spécialisés, pourraient réfléchir ensemble et accomplir leurs missions communes pour le meilleur du service public !

    Avis aux candidats amateurs de régionalisation des politiques (si Ségo passait par là, qu'elle n'hésite pas à poster un message !)


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  • Ici, une synthèse actualisable des différentes propositions des candidats en matière de diffusion culturelle (leur ordre est aléatoire) :

    François Bayrou sensible à la culture libre et participative, mais restant dans l'entre-deux (rémunérer au titre du droit de copie privée) :

    "Il y a, dans la vie, des choses qui ne sont pas marchandes. [...] C'est pourquoi, par exemple, j'ai tellement soutenu le logiciel libre. Grosso modo, je pense que sur internet, la logique marchande, nécessaire si l'on veut que les droits d'auteur soient respectés, et la logique d'une certaine gratuité, vont durablement coexister. Vous aurez des plate-formes de téléchargement payant moins chères qu'aujourd'hui - car aujourd'hui, il apparaît comme cher. Et vous aurez une logique plus coopérative, avec des gens qui consentiront à donner une contribution générique pour être dans l'univers des échanges. Si les petits cochons ne le mangent pas, Internet préfigure un nouveau modèle de développement pour l'humanité." source : www.telerama.fr

    "Nous sommes d'accord pour que soient réaffirmés les droits d'auteur et les droits voisins, mais nous n'acceptons pas que soit porté atteinte à d'autres droits tout aussi essentiels. La copie privée, pour un usage personnel, familial et amical, est un droit pour le consommateur, pour le citoyen qui se cultive et recherche un épanouissement. En matière numérique, ce droit se traduit d'abord par l'interopérabilité garantie par la loi, c'est-à-dire la possibilité de faire passer l'oeuvre d'un support à un autre, de la faire partager dans le cercle privé. Cela mérite une compensation équitable : je suis favorable à une indemnisation modérée de la copie privée." source : www.bayrou.fr

    Nicolas Sarkozy : difficile de trouver ses positions sur l'internet et la culture. Il parle surtout de l'internet comme outil économique. Sur l'internet et la diffusion culturelle, c'est le candidat de la défense des droits d'auteur traditionnels.

    "Nous avons eu en France un débat difficile sur la question des droits d'auteurs et des dorits voisins. Je me suis impliqué pleinement pour faire respecter le droit d'auteur, parce que créer c'est travailler, parce qu'il n'y a pas de génie sans un travail acharné et que je n'accepte pas que le travail soit spolié sous prétexte qu'aujourd'hui ce serait techniquement possible, que les producteurs de disques gagneraient trop d'argent ou que ce serait plus pratique de télécharger sur Internet plutôt que d'aller à la FNAC. Pour autant, entre utiliser n'importe comment le téléchargement, au risque de pénaliser une technique prometteuse qui est celle du peer to peer, et la répression érigée en seule solution, il y a beaucoup d'alternatives possibles." source : u-m-p.org

    Marie-George Buffet pour un service public de l'Internet : une proposition originale, un peu datée, mais qui mériterait certainement d'être creusée.

    "Il faut à la fois favoriser une large diffusion des oeuvres - ce que permet Internet - et respecter les droits des auteurs sur leurs oeuvres. Nous voulons créer des plates-formes publiques de téléchargement qui garantirons ces deux objectifs et seront financées par une taxe sur les serveurs privés." source www.telerama.fr

    Jean-Marie Le Pen : un peu vague, on ne voit pas vraiment quels sont les "intérêts légitimes" (des auteurs ? des diffuseurs ? des consommateurs ?)

    " Pour Internet, il faut se garder de légiférer trop vite. Il faut laisser se stabiliser les modes de communication pour voir comment on peut efficacement défendre des intérêts légitimes" source : www.telerama.fr

    Segolene Royal : transformer la loi DADVSI. Elle a choisi de défendre le P2P. Il reste à préciser concrètement quel serait le nouveau cadre légal qu'elle appelle de ses voeux.

    "Le numérique et le P2P sont une chance et non, comme certains le disent, une catastrophe pour la culture. S'il est indispensable de permettre une rémunération juste des créateurs et de ceux qui les entourent, il ne saurait être question de maintenir artificiellement des modèles économiques dépassés par l'évolution technique, et de maintenir un cadre légal en décalage complet avec le progrès technologique et les aspirations manifestes du public." source : www.desirsdavenir.org 


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  • Photo : le musée en herbe, une des rares initiatives originales en matière de musées de service public (ici éducation artistique).

     

    J'ai déjà dit la pauvreté des propositions culturelles des différents candidats à la présidentielle, où les discours lyriques (sur le thème la culture est un droit inaliénable de la personne humaine, permet de transcender nos conditions, etc.) et les variations incantatoires sur motifs éculés (démocratisation) étouffent toute vision pragmatique et efficace d'une politique culturelle qu'il faut pourtant entièrmenet reconstruire.

    Preuve que personne ne rentre vraiment dans le vif du sujet : je n'ai trouvé aucune proposition en matière de musées. Les musées sont pourtant le symbole même de l'action culturelle publique : de la Révolution qui les invente pour en faire les écoles du peuple aux villes actuelles qui investissent dans leurs musées pour redynamiser leur territoire (cf. Bilbao ou Liverpool à l'étranger, Nîmes, Saint-Etienne ou le récent MacVal parmi tant d'autres).

    Les enquêtes du Ministère sur les pratiques culturelles des Français montrent que les musées, quasiment à égalité avec les bibliothèques (30 % des Français les ont fréquentés dans l'année) sont les équipements culturels publics les plus fréquentés. Un Français sur trois, c'est quand même pas mal, même si on peut certainement faire mieux (77 % des Français ont fréquenté un musée au cours de leur vie). Mais il faut d'abord remarquer que la fréquentation des musées stagne depuis les années 1980 où de grands efforts (grands travaux présidentiels, effets de la décentralisation) avaient sensiblement augmenté leur audience. Il semble même qu'elle tend à s'éroder ces derniers-temps.

    Une des causes du problème : le manque de proximité. Les musées ne sont pas considérés en France comme des services publics de proximité (on aurait beaucoup à apprendre des centres d'interprétation canadiens, pilier de la politique de cohésion sociale). Malgré le développement de politiques des publics (notamment l'essor des activités de communication ou d'action pédagogique), le musée français souffre encore de son histoire. Il demeure ce temple du savoir et des chefs-d'oeuvre du XIXe siècle, sensé impressionner le visiteur et glorifier le rayonnement culturel du pays. Le récent MacVal, musée d'art contemporain monté en banlieue parisienne par le Conseil général tente, assez solitairement, l'expérience de la machine à diffusion culturelle contre le modèle du temple de la délectation esthétique, réservé aux initiés.

    Le manque de proximité, c'est aussi l'hypercentralisation. Les musées nationaux, pourtant financés par l'ensemble des Français, sont majoritairement des musées parisiens. Les 5 musées les plus fréquentés sont des musées nationaux parisiens, qui concentrent la plupart des crédits, des professionnels et des collections, Louvre, Versailles, Orsay, Beaubourg, Picasso en tête. Si l'on ajoute à cela les nombreux musées de la Ville de Paris, les autres musées situés à Paris ou les Galeries nationales du Grand Palais (plus d'1 million d'entrées), la carte culturelle française est sans appel. De l'autre côté, il y a plus de 1200 musées estampillés "Musées de France". Ce n'est donc pas un problème d'équipement, la France étant un des pays les plus densément équipés en musées.

    Alors, quel candidat proposera une vraie politique de déconcentration culturelle (négociation d'une carte muséographique comme la BNF coordonne une carte documentaire avec ses pôles associés en région, dépôt des dizaines de milliers d'oeuvres des réserves des grands musées nationaux dans les musées de province, rattrapage des investissements parisiens avec l'allocation à des projet régionaux et outre-mer de budgets équivalents à ceux des grands travaux présidentiels parisiens des années 80-90, déplacement de certains musées parisiens, soumis à une offre culturelle trop dense dans leur environnement, dans des collectivités qui ne demandent qu'à investir, développer et diffuser ces collections, parmi les réponses les plus évidentes au problèmes des musées français).

    Quel candidat posera la question de la fonction du musée dans la société actuelle : intégration des musées dans la société de l'information, développement des technologies numériques dans les musées à des fins de diffusion culturelle universelle et de médiation à l'art, l'histoire, la connaissance, diversifier les points de vue muséographiques, ouverture des musées sur le contemporain pour en faire des machines au service de la compréhension du monde, etc.

    Bref, chers candidats, il vous reste 1 mois et demi pour parler des musées.


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  • Trouvé en farfouillant - oui, tandis que certains surfent sur les déferlantes d'informations et autres redirections porno (je devais caser "porno" pour augmenter le référencement), j'ai plutôt tendance à farfouiller sur le net (devrait-on toujours savoir ce que l'on cherche ?) :

    Chansons de campagne : un florilège de chansons de candidats à la présidentielle. On appréciera les cuivres très "wizz" et les ritournelles violon-synthé d'une ode à Jacques Chirac en 1988, à moins qu'il ne s'agisse d'un hommage à l'arrangeur de Boney M. Pour les déçus de la gauche au pouvoir, écouter à la suite la chanson de Mikis Théodorakis pour le PS en 77 et la chanson de campagne de Mitterrand en 1981 : passage brutal du jansénisme à la surboom. Sinon, pêle-mêle, une chanson pour Alain Madelin (tiens, il était candidat ?), un zouk sur fond de discours Le Pen (no comment) et un récent rap sarkozyste ou comment MC-Jean-Guillaume y va pas mettre le feu.

    Bref, quand la culture politique tente la rencontre avec la culture populaire.

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  • Pascale Ferran, réalisatrice du célébré Lady Chatterley interpellait les candidats lors de la dernière cérémonie des Césars en un magistral : "Il leur reste 55 jours pour oser prononcer le mot culture."

    Télérama vient de consacrer un dossier à la place de la culture dans la campagne : chaque candidat dit sa cision de la culture, de la politique culturelle mais aussi ses propres goûts culturels. En bons héritiers de Louis XIV, nos différents présidents ont fait de leurs goûts la doctrine qui faisait souvent défaut à l'action culturelle publique. Certes, parfois pour le meilleur : sans Pompidou, pas de Beaubourg. Une bonne partie de l'establishment a tout fait pour torpiller le projet et lorsque Giscard l'inaugure du bout des lèvres, c'est parce que le projet était irréversible à la disparition de son prédecesseur. Giscard, fidèle à sa propre culture, très bourgeoise old style, sauva la gare d'Orsay qui devint un temple à la gloire des arts du XIXe siècle. Enfin, il fallut Chirac pour que les "arts premiers" retrouvent une place au Louvre. Mais c'est bien sûr Mitterrand, en bon florentin, qui imprima le plus durablement sa marque personnelle dans la politique culturelle au risque de laisser le Ministère, privé de son bon Jack, dans une crise durable d'identité.

    Qu'on le déplore ou non, les institutions monarchisantes de la Ve République, et la culture politique nationale qui puise ses caractères originaux dans le temps long de l'interventionnisme étatique version François Ier, Louis XIV ou Louis-Philippe, font de la vision culturelle du président le principal moteur de l'action publique.

    Mais les Français dans tout ça ?

    On a longtemps regardé de notre hauteur culturelle le reste du monde, Etats-Unis en tête, en considérant que nous étaions un peuple fou de culture. L'exception culturelle, alors qu'on aurait du mal à en définir les contours, est un motif fort de consensus national. Mais dans les faits des pratiques culturelles comme la lecture, le théâtre, le cinéma, la musique, stagnent ou baissent irrémédiablement. La télé et internet, où la part culturelle reste à déterminer, sont devenues nos principales nourritures mentales. Peut-être Bové, dans sa croisade anti-malbouffe, se sentira-t-il impliqué ?

    Récemment l'administration culturelle s'est félicitée du taux de fréquentation des bibliothèques (30 % : enquête Credoc 2006). Mais les pays anglo-saxon enregistrent depuis des décennies une fréquentation beaucoup plus importante, qui peut aller à 90 % dans les pays scandinaves.

    Aujourd'hui, en plein débat présidentiel, personne ne parle de culture, comme s'il ne s'agissait pas d'un enjeu fondamental pour le changement que tous entendent conduire, comme si la Culture ne pouvait nous mobiliser et influencer nos votes. Les récentes rencontres de Télérama avec les différents candidaits nous fournissent une première explication. A la lecture des différentes propositions, on ne peut qu'être surpris de la proximité entre les différents candidats (à l'exception notable de Le Pen qui semble s'en battre l'oeil - sans mauvais jeu de mot). La politique culturelle ne se discute plus : la démocratisation de l'accès - dont on dénonce pourtant l'échec depuis 10 ans - reste le pilier de la doctrine de l'action publique, soutien à la création, diversité du tout culturel, éducation artistique à l'école pour les poncifs éculés de l'action culturelle.

    Parallèlement, personne n'évoque la réforme du droit d'auteur, faite dans la plus grande confusion l'année dernière (loi DADVSI d'août 2006), et qui aujourd'hui non seulement ne garantit pas la juste rémunération de la création et la protection des oeuvresn mais bride la libre diffusion du savoir. C'est pourtant un des points à régler pour réaliser le vieil idéal de démocratisation.


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